Italie : bella ciao!
Économie
Le scénario d’un ralentissement de la croissance économique mondiale était pourtant bien balisé. Un mauvais cocktail pourrait faire dérailler les perspectives pour 2018 et 2019, sur un scénario central moins optimiste. Les tensions commerciales entre Etats-Unis et Chine, la crise de change en Turquie et le vent politique italien n’en finissent pas d’agiter les marchés boursiers. Retournement sur l’ensemble des places, pendant que le prix du pétrole franchit les 80$ le baril contre 66$ en mars dernier.
Aux Etats-Unis, l’économie ralentit à + 0,6 % (+ 2,3 % sur un an), avec une contribution positive de la construction, une hausse de l’investissement et une croissance du revenu réel de 3,8 %. L’indicateur avancé du Conference Board continue son ascension et la confiance des ménages se renforce.
En zone euro, la conjoncture favorable a permis de converger vers un déficit inférieur à 3 % du PIB pour 19 membres. Le raffermissement de la croissance, certes ralentie à + 0,4 % contre + 0,7 % antérieurement, permet au taux de chômage de reculer à 8,5 % : l’Espagne a continué d’ouvrir le bal des performances au T1 2018 avec + 0,7 %, suivi de la France à + 0,4 % et de l’Allemagne et de l’Italie ex-aequo avec + 0,3 %. Mais les élections italiennes et la victoire des deux forces antisystèmes pourraient créer l’effet papillon, soit un risque systémique sur l’ensemble de la zone. L’euro a glissé sous les 1,17, son niveau de novembre 2017. Bien entendu, le scénario du pire n’est pas le plus probable, surtout que l’Italie n’est pas la Grèce : certes, la dette italienne représente 132 % du PIB, soit 2 300 Mds€, mais elle est détenue à 70 % par des résidents avec une maturité de 7 ans. La compétitivité a permis une amélioration du déficit courant et moins de dépendance vis-à-vis du financement extérieur.
En chiffres, Il Bel Paese est la troisième économie de la zone euro avec une contribution à hauteur de 14 % du PIB : le pays a renoué avec un sentier de croissance certes plus lent que ses partenaires, pénalisé par la « tempête grecque ». Pourtant, la réorientation de l’appareil productif, démarré avant la crise de 2008, pour booster la compétitivité porte ses fruits : + 23 % de hausse des exportations par rapport à 2007, dont 14 % pour les seuls biens, et une moindre dépendance vis-à-vis de la demande domestique. Le niveau d’investissement total, inférieur de 4 % par rapport à son niveau de 2007 occulte de grandes divergences sur le territoire italien : une réallocation de l’investissement productif sur les secteurs et géographies les plus efficientes s’est traduite par une polarisation massive de l’investissement en Italie du Nord. Le résultat en est l’accroissement des inégalités régionales comme dans les autres métropoles européennes. Milan a renforcé sa position dominante : plus résiliente aux chocs, pendant l’épisode de la crise de la dette souveraine en 2012, elle affiche avec insolence un rythme de croissance sur long terme de 1,5 % par an contre 0,5 % en moyenne pour l’Italie. Sur le marché immobilier, ce dynamisme, corrélé à une croissance de l’emploi milanais tonique, a porté la croissance locative et l’appétit des investisseurs depuis 2016 : les taux se sont écrasés. Beaucoup de véhicules SCPI, OPCI et autres foncières ont su trouver des relais de croissance dans la capitale italienne. Aussi, la montée des taux à 10 ans des souverains italiens fait pâlir : une régression simple entre taux des souverains et taux de capitalisation suggère que les taux de capitalisation sur le marché prime des bureaux à Milan sont parmi les moins élastiques en Europe : pour une même hausse des taux de rendements à 10 ans, l’effet sur les taux de capitalisation sur les taux prime milanais est bien inférieur à ce qu’il est sur tous les autres marchés en Europe. Aussi, le récent choc de taux sur les obligations à 10 ans peut être absorbé s’il est de courte durée. Le nouveau gouvernement doit maintenant faire des annonces de politique économique crédibles dans le respect des règles européennes. Condition sine qua none pour éviter une nouvelle envolée des rendements à 10 ans.
Évolution comparée des prix des matières premières (en US$)
Source : S&P
Taux souverains (en %)
Source : BDF, Bundesbank, FED
Taux d’intérêt
L’heure est désormais au flight to quality notamment vers la dette américaine, l’Allemande ou la France dont les taux à 10 ans se sont respectivement détendus de 20 bps et 7 bps. Les taux Italiens ont atteint 2,45 %. La volatilité est bien de retour et les primes de risques également : n’oublions pas qu’elles sont de forme quadratique !
Source : AFT, Bundesbank, FED
Extrait de l’étude mensuelle « L’immobilier d’investissement dans le monde » rédigé par Béatrice Guedj (Senior Advisor de l’IEIF) ; Étude réservée aux adhérents de l’IEIF.
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