Ainsi, les recherches menées ne trouvent ni les traces d’une réorientation géographique massive des populations, ni celles d’une recomposition des flux vers des espaces isolés, hors des aires d’attraction des villes. Il n’y a donc pas de grande « rupture » territoriale entre les intentions de mobilité avant et après la crise.

Les façades littorales confirment leur attractivité depuis le début de la pandémie. Cependant, les soldes migratoires des littoraux ont légèrement baissé dans certains territoires ce qui pourrait indiquer une forme de saturation des marchés immobiliers locaux.
Un certain nombre de territoires aux dynamiques migratoires plutôt faibles connaissent néanmoins une variation positive importante, en particulier dans le cœur du Massif Central, au Nord de la région Nouvelle-Aquitaine, ou dans le piémont des Pyrénées. Ces « petits flux » peuvent contribuer à alimenter une « renaissance rurale », géographiquement sélective.

Les espaces périurbains enregistrent presque tous un « effet Covid » positif sur leur solde migratoire. Cette attractivité des communes dites « de grande couronne » est une conséquence du desserrement urbain, qui désigne le départ des populations des centres urbains au profit de leurs périphéries. Le phénomène est particulièrement vrai depuis Paris intra-muros suite à la crise sanitaire.
Enfin les espaces ruraux, à l’échelle nationale, voient aussi leurs flux migratoires augmenter fortement après le début de la crise sanitaire. Prudence néanmoins, selon l’étude, la mise en perspective historique révèle que la renaissance rurale ne touche pas nécessairement l’ensemble des territoires ruraux et qu’elle concerne en particulier des territoires proches des centres urbains. Ce sont les « campagnes urbaines » mais aussi des territoires qui bénéficient d’aménités spécifiques : l’accessibilité, un climat, une dynamique économique locale favorable, par exemple.

Le flux de départs des villes vers la campagne existe, sans être un phénomène structurant à l’échelle nationale, ni une tendance qui s’accentue. Les mouvements de l’urbain vers une maille rurale ne représentent que 14 % de l’ensemble des projections des français contre 28 % pour les flux entre mailles urbaines. Même constat pour les habitants de villes les plus tendues, candidats les plus identifiés à l’exode urbaine. Loin de se rediriger exclusivement vers la campagne, ils se projettent dans une myriade de territoires, parmi lesquels des territoires ruraux, certes, mais aussi une variété de villes, petites et grandes.

Si les résultats préliminaires de l’étude repéraient le renforcement et l’accélération de phénomènes déjà présents dans les territoires à savoir le desserrement urbain, la périurbanisation – qui s’étend à d’autres territoires et devient une « méga-périurbanisation », la « renaissance rurale », et le renforcement de l’attractivité des espaces de villégiature, il convient d’ajouter, au vu de ces résultats, un processus de rééquilibrage dans l’armature urbaine française.

L’équipe ayant traité le volet qualitatif de l’étude a identifié cinq « profils » différents de ménages ayant quitté un centre urbain depuis le début de la pandémie :

• Les retraités et pré-retraités dans les espaces traditionnels et de villégiature ;
• Les ménages de profession intermédiaire et de classe populaire stable rallongeant leurs trajet domicile-travail mais rendu supportable grâce au télétravail qui en réduit la fréquence ;
• Les cadres supérieurs et professionnels qualifiés avec enfants : l’un des deux membres du ménage conserve souvent son poste métropolitain et alterne télétravail et navettes de longue distance régulières, tandis que l’autre travaille à domicile ;
• Les familles de diplômés alliant télétravail et reconversion professionnelle plus ou moins alternatifs ;
• Les marginaux et population à la précarité plus ou moins choisie pour lesquels il est possible de vivre grâce à la solidarité locale, la débrouille et l’autosuffisance.