L’IEIF doit se réinventer tout en demeurant fidèle à son ADN
Christian de Kerangal vient de succéder à Guy Marty à la direction générale de l’IEIF (Institut de l’épargne immobilière et foncière). Il nous livre sa feuille de route pour l’institut qui a fêté ses 30 ans.
Business Immo : Comment l’IEIF, qui vient de célébrer ses 30 ans d’existence, va-t-il aborder les prochaines années qui s’annoncent cruciales sur son évolution, notamment dans l’industrie immobilière ? Quelle part tiendra l’innovation dans l’activité d’analyse et de recherche de l’Institut ?
Christian de Kerangal : L’Institut de l’épargne immobilière et foncière vient effectivement de fêter ses 30 ans. C’est un anniversaire exceptionnel pour un organisme d’études et de recherche privé et indépendant. Cela représente 1 720 études produites, 55 colloques et 460 réunions Adhérents qui ont rassemblé près de 17 000 personnes, 82 annuaires, 25 ouvrages, 77 numéros de Réflexions Immobilières… L’Institut a su s’adapter tout au long de ces 30 années pour répondre aux attentes de ses membres –et plus largement du marché –, innover à la fois dans l’observation des fonds immobiliers (foncières cotées, SCPI, OPCI…) et dans le suivi de l’économie, de la finance et de l’épargne immobilière. L’immobilier professionnel est aujourd’hui confronté à de nombreux défis : l’arrivée massive de capitaux vers l’immobilier, l’internationalisation croissante des acteurs, la révolution numérique, qui impacte à la fois la conception des produits immobiliers et les business model des acteurs, le vieillissement général de la population dans les pays développés, la métropolisation et la compétition accrue entre les territoires, le changement climatique, etc. La liste n’est pas close ! Face à ces mutations profondes, les acteurs de l’industrie immobilière ont besoin d’analyses prospectives qui leur permettent d’ajuster leurs réflexions stratégiques. Observateur engagé, l’IEIF continuera à leur apporter cette nécessaire prise de recul et se doit d’élargir ses capacités d’études à ces nouveaux horizons. Dans ce sens, nous avons lancé début 2016, en association avec Business Immo, le Club Innovation & Immobilier qui permet à ses membres de mieux intégrer la dynamique de l’innovation dans leurs processus et réflexions et de mieux appréhender l’impact des révolutions technologiques et sociétales actuelles sur l’immobilier.
BI : Vous succédez à Guy Marty à la tête de l’IEIF, quelle est votre feuille de route ?
CdK : Je souhaite tout d’abord rendre hommage à Guy Marty pour son action forte depuis 30 ans au service de l’industrie immobilière. Lui succéder est à la fois une joie et un challenge. Face aux nombreux enjeux que nous avons rappelés, l’IEIF doit se réinventer tout en demeurant fidèle à l’ADN d’origine qui a fait son succès. Je souhaite notamment élargir nos analyses aux « nouvelles » classes d’actifs qui intéressent les investisseurs : le commerce, l’hôtellerie, la santé, les résidences gérées, pour lesquelles les données sont moins élaborées et qui doivent à mon sens faire l’objet d’études économiques approfondies. L’Institut va également développer de nouvelles thématiques d’analyses, notamment autour de l’innovation – nous en avons parlé –, du financement des acteurs de l’immobilier et de l’allocation d’actifs. Nous allons aussi approfondir les études et statistiques que nous avons développées autour des fonds immobiliers, notamment afin de faciliter une meilleure compréhension et comparabilité de ces différents véhicules. Nous le ferons en coopération étroite avec les associations professionnelles représentatives, comme la FSIF, l’ASPIM, l’AFG ou la FFSA. Enfin, l’IEIF va s’engager de manière active dans une digitalisation accrue de ses contenus.
BI: L’Institut est aujourd’hui cantonné au périmètre français. Prévoyez-vous une ouverture vers l’Europe ? En lien avec d’autres instituts ou organisations professionnelles (EPRA, INREV…) ?
CdK: Certaines de nos études sont déjà internationales. Toutefois, nous souhaitons en effet nous développer plus résolument vers l’Europe afin de pouvoir offrir à nos membres des analyses comparatives et prospectives sur les principaux marchés européens, mais également sur les acteurs de l’investissement. Pour ce faire, nous allons nouer des partenariats avec des structures qui nous ressemblent au Royaume-Uni et en Allemagne dans un premier temps, puis probablement au Benelux, en Italie et en Espagne, afin de pouvoir co-produire des études, de la recherche, des interventions croisées… Dans le même sens, nous souhaitons également renforcer nos relations avec les organisations professionnelles européennes comme l’INREV ou l’EPRA.
BI: Quelle est la typologie actuelle des membres de l’Institut ? Doit-elle évoluer ? Faut-il ouvrir l’Institut à d’autres acteurs de l’industrie financière en lien avec l’immobilier ? Aux acteurs publics et para-publics qui participent à la construction de la ville ?
CdK: Aujourd’hui, l’Institut compte un peu plus de 100 sociétés adhérentes. Parmi celles-ci, environ les deux tiers sont des investisseurs au sens large : compagnies d’assurance, sociétés de gestion de SCPI, d’OPCI et/ou de FIA, foncières cotées, fonds d’investissement internationaux… Nos autres membres sont très diversifiés : promoteurs, grands utilisateurs, banques, conseils en immobilier d’entreprise, consultants… L’IEIF a vocation à produire des réflexions transverses et donc à s’ouvrir à de nouvelles typologies d’acteurs. Pour autant, cette ouverture sera progressive, au fur et à mesure que nous développerons des analyses adaptées.