Selon MSCI, une guerre commerciale pourrait pénaliser les secteurs de la cote aux Etats-Unis plus fortement qu'en Chine. Notamment dans les nouvelles technologies. Un risque ignoré par les marchés, pour l'instant.

Daimler en Allemagne, Starbucks et  Harley-Davidson aux Etats-Unis,  ZTE en Chine, les grandes entreprises exportatrices commencent à s'émouvoir des conséquences néfastes de la  politique commerciale protectionniste de Donald Trump.

Dans ce contexte, le fabricant d'indices MSCI s'est interrogé sur les secteurs qui sortiraient gagnants ou perdants d'une guerre commerciale. « Alors que beaucoup d'études se sont focalisées sur la forte dépendance de la Chine aux exportations vers les Etats-Unis, les compagnies américaines - et ceux qui investissent dedans - ont une plus forte exposition à la Chine que les autres en termes de revenus », constate Zhen Wei, responsable de la recherche en Chine.

Ainsi 5,1 % des revenus des sociétés de l'indice MSCI US viennent de l'Empire du milieu « et pourraient être à risque » en cas de guerre commerciale, contre une exposition aux Etats-Unis de seulement 2,8 % pour les valeurs du MSCI China.

 

Les technologies de l'information en première ligne

Quels sont les secteurs les plus sensibles ? En Chine, c'est celui des technologies de l'information avec 9 % de ses revenus provenant des Etats-Unis. C'est aussi le secteur qui pèse le plus lourd dans l'indice, ce qui n'est pas neutre sur la performance de cet indice. Le secteur de l'énergie est aussi en danger (7,8 % de ses revenus), ainsi que l'industrie (2,6 %) et la consommation discrétionnaire (1,7 %).

Aux Etats-Unis, le nombre de secteurs sensibles à la croissance chinoise est beaucoup plus élevé : outre le secteur IT (14,2 % des revenus), les matériaux (7,1 %), l'industrie (5,6 %), la consommation courante (5,1 %) et l'énergie (4,6 %) auraient aussi beaucoup à perdre. Seuls les secteurs domestiques, comme l'immobilier, les télécommunications et les utilities seraient préservés.

Conclusion de Zhen Wei, « alors qu'une escalade dans la guerre commerciale pourrait conduire à un résultat perdant-perdant, l'impact serait plus important pour les actions américaines ». Donald Trump prendra-t-il alors le risque de faire dérailler Wall Street ?

Pour l'instant, les marchés n'intègrent pas, en apparence, ce risque. Depuis le début de l'année, l'indice MSCI US gagne 2,13 %, soutenu par les grandes valeurs technologiques, qui bénéficient d'un statut de valeur refuge en raison de leur forte croissance. Dans le même temps, la Bourse chinoise est  entrée dans un « bear market » , un marché baissier.

Beaucoup d'investisseurs ont été surpris de voir que les marchés réagissaient jusqu'à présent avec autant de complaisance à cette menace pourtant réelle d'une guerre commerciale à grande échelle » relate Aurel BGC. « Mais les marchés ont peu de visibilité : ils attendent de voir si les droits de douane seront réellement appliqués et quelles en seront les conséquences.

Pour autant, le vernis commence à craquer y compris à Wall Street. Si le MSCI Chine perd 8,8 % depuis le 12 juin, le MSCI US perd lui 2,13 %, le sous-indice technologie de l'information perdant même 3,15 %. Quant au Dow Jones, indice des grandes valeurs exportatrices américaines, il vient de perdre 4,10 % depuis le 12 juin, dans le sillage de Boeing (-14 %), Caterpillar (-10 %) et Intel (-9 %), trois valeurs réalisant une partie importante de leur chiffre d'affaires en Chine.

Même l'indice des valeurs moyennes américaines, le Russell 2000, composé surtout de valeurs domestiques commence à souffrir. Il a perdu 2,25 % depuis le 20 juin, jour où il avait touché un nouveau record historique. Cela sonne aussi comme un avertissement pour Donald Trump qui, depuis son élection, voit dans Wall Street un indicateur de la réussite de sa politique « America Great Again ».

Des valeurs à risque

MSCI a aussi ciblé les entreprises les plus à risques aux Etats-Unis et en Chine en fonction de leur qualité intrinsèque, mais aussi de la problématique guerre commerciale. Côté américain, on retrouve Micron Skyworks, Technology Solutions, Marvell, Qualcomm, Qorvo ou Broadcom limited et côté chinois CNOOC, Lenovo, Nexteer, Fosun et AAC Tech. Sachant, constate MSCI qu'étant donné « les effets potentiels d'une guerre des tarifs douaniers, même les valeurs de haute qualité avec des valorisations attractives doivent être réévaluées en fonction d'une telle exposition à ce risque ».

Pierrick Fay
@pierrickfay